La boule au ventre.
Trouver cette expression sur les forums et replonger en enfer.
Tous ces soirs ou rentrant du travail je voyais le volet de la chambre fermé.
Je savais que j’allais la trouver au mieux endormie, plus ou moins lourdement, au pire inconsciente.
Ces nuits passées à écouter sa respiration pour estimer son état.
Ces réveils en sursaut alerté par l’état de sa respiration, essayer de la faire réagir en lui parlant puis en la pinçant, la mettre sur le côté, dégager au maximum sa bouche et son nez, composer le 15 et décrire calmement son état, répondre aux questions.
Le temps que les secours arrivent rassembler les papiers, la dernière ordonnance et chercher le traitement, les bouteilles, trouver de quoi la couvrir.
Répondre aux questions du SAMU des pompiers ou des ambulanciers.
Y compris à celle-ci : « elle n’est pas suivie ? » lui répondre qu’elle sortait de cure moins de huit jours auparavant.
Combien de fois déjà, je ne sais plus.
Mais je sais par contre que c’est arrivé y compris pendant des périodes de suivis en hôpital de jour.
Que j’ai alerté le service sur sa consommation croissante avec pour réponse « en l’absence d’un service d’urgences psychiatriques vous devez la convaincre de se rendre aux urgences ».
Je sais également que ma femme se présentait avec plus de 2 grammes en hôpital de jour et que l’équipe la laissait se reposer sans qu’elle participe aux activités pour ensuite la laisser rentrer ou la reconduire en voiture. Personne à prévenir surement pas car je sais ne pas avoir raté d’appel ces jours là.
Et c’est moi et encore moi tout seul qui est décidé de lui dire : « tu ne conduiras plus». Au regard des risques, je l’ai fait tardivement je le reconnais, mais à ma décharge je n’avais comme informations pour le décider que ma perception de son état de santé et la couleur des triangles sur les boites de son traitement.
Entendre ce médecin addictologue que je tenais à remercier après son décès me dire :
« étant donné sa pathologie cela pouvait arriver n’importe quand ».
Prendre conscience du niveau d’insécurité de notre parcours de vie et du fait qu’il était parfaitement connu des professionnels en responsabilité de son parcours de soins.
Limites de responsabilités assumées, manque de moyen, ou bien peut-être une forme de déni ?